Communiqué de presse

Une défaite de l’expression associative et citoyenne !

Ce dimanche 12 mars, la population de la Ville de Genève a refusé l’initiative « Genève Zéro Pub – Libérons nos rues de la publicité commerciale » avec une faible majorité. Les associations à la base de cette initiative, comme les autres associations, les collectifs et les partis politiques venus en soutien dans le comité unitaire déplorent ce résultat négatif et malgré tout fort honorable. Rappelons qu’il s’agit de Genève sans publicités, du GLIP (Genève libérée de l’invasion publicitaire), du ROC (Réseau objection de croissance), et de Quartiers collaboratifs, avec le soutien de Greenpeace Suisse, de la Grève Féministe, de la Grève du climat, de Noé21, de Postcapitalisme Romandie, de Sortir de la pub, d’attac-Genève, ainsi que des partis, le PSVG (Parti socialiste Ville de Genève), les Vert-e-s, et Ensemble à gauche – Solidarités, DAL, Parti du travail. Toutes et tous se sont vaillamment battu·es pour que cette initiative passe. Un regret domine : les tentatives de censure des opposant·es et leur campagne fallacieuse faite de chiffres fantaisistes l’ont emporté. Les résultats sont pourtant serrés, car c’est plus de 48% des votant·e·s qui se sont prononcés en faveur d’une ville libérée de la publicité. Bien sûr, le taux assez faible de participation constitue un autre regret.

 

Un espace public de plus en plus incohérent

Ce résultat maintient un statu quo où notre attention, l’un de nos biens les plus précieux, reste bradée au nom du profit des grandes marques. Elle laisse celles-ci disposer librement des rues et du regard des passant·es pour inciter à consommer davantage. Pourtant, comme l’a relevé le Tribunal fédéral, l’intérêt de la population à se soustraire à la publicité aurait tout à fait justifié une restriction à la liberté de commerce. L’espace public restera donc un espace dédié à la surconsommation et où de plus en plus de dissonances se feront sentir : d’un côté, des incitations à consommer plus raisonnablement, de l’autre, des images vantant toujours plus un mode de vie insoutenable représenté comme un symbole de consécration sociale : SUV, vols en avion, malbouffe et nourriture industrialisée. Des incohérences que les autorités auront à l’avenir toujours plus de peine à légitimer. La pub visant à modifier le comportement de ses « cibles », crée des besoins et des désirs artificiels pour faire vendre des produits. La publicité dans la rue est partout, cherchant à influencer les consommateur·ices : en particulier les enfants et les ados qui sont souvent les premières cibles. Les marques savent bien qu’elles doivent créer un lien dès le plus jeune âge. Les enfants reconnaissent 70 logos de marques avant de savoir lire, 400 avant leurs dix ans.

 

Un mouvement global lancé par l’initiative

La défaite de la votation n’effacera pas le mouvement lancé par Genève zéro pub. Dans de nombreuses villes ailleurs en Suisse, les politiques se mobilisent et les lois sont en passe de changer : dans le canton de Genève, à Vernier – mais aussi dans le canton de Vaud, avec des initiatives à Lausanne, Yverdon-les-Bains, Prilly, Le Mont-sur-Lausanne, et aussi à Zurich et à Neuchâtel, où la présence des panneaux d’affichage est de plus en plus contestée. En cela, la votation de Genève Zéro Pub reste assurément une victoire, car c’est grâce aux arguments qu’elle porte que la publicité a été problématisée dans l’espace public. Aujourd’hui, celle-ci est résolument perçue comme une question de société. Nous sommes confiant·es que le mouvement est lancé et, même si la population genevoise ne renonçe pas aujourd’hui aux revenus financiers de la publicité, ce n’est qu’un début : le changement social et climatique est en marche. Avec l’engagement de mouvements comme la Grève du climat, la Grève féministe, Greenpeace et ATTAC, la question de la publicité est résolument fédératrice et au cœur du changement social qui s’imposera tôt ou tard.

 

Une déception écologique et sociale

Nous déplorons que ce résultat n’aille pas dans le sens des urgences contemporaines pour des politiques plus écologistes et sociales bien qu’il encourage à penser un changement de société. La publicité par son incitation à la consommation représente un obstacle pour une transition vers une société plus sobre, plus durable et plus juste. Ces incitations constantes à la consommation sont responsables du gaspillage, de la montagne de déchet que nous produisons ici comme à l’étranger, de l’endettement et de surcoût dans les domaines de la santé notamment. 43% de notre bilan carbone en Ville de Genève est lié à la consommation de biens et de services. S’attaquer à la publicité, c’est participer à réduire ces émissions. La publicité est par ailleurs un vecteur de normes culturelles reproduisant des schémas de dominations sociales, notamment par la représentation des corps et des comportements valorisés socialement.

 

Des chiffres fantaisistes, basés sur la peur

Enfin, rappelons que nos opposant·es n’auront pas hésité à manipuler les chiffres dans leurs argumentaires :

  • En parlant de 20% d’affichage commercial en Ville de Genève, ils et elles ignorent des centaines de panneaux qui ne sont réservés à aucun type d’affichage en particulier.
  • Dans leurs 74% d’entreprises soi-disant « locales », elles et ils comptent des entreprises que l’on retrouve à travers toute la Suisse comme Coop ou Migros. Nous sommes donc bien loin de notre épicerie de quartier, du salon de coiffure du coin ou de l’ébénisterie artisanale. En effet, les petites structures ont très rarement les moyens de se payer ces affichages onéreux et fonctionnent plutôt sur le bouche-à-oreille, les prospectus ou la publicité numérique, plus invasive mais plus ciblée.
  • Les référendaires nous annoncent 2,3 panneaux pour 1’000 habitant·es. Pourtant, en reprenant leur chiffre de 3’011 supports publicitaires (la Ville parle de 4’713) et en le divisant par les 200’000 habitant·es en Ville de Genève, il s’agit plutôt de 15 panneaux pour 1’000 habitant·es.
  • Enfin, alors que la Ville parle depuis le début de 4 millions de pertes, les opposant·es ont avancé un montant de 10 millions en jonglant avec des chiffres. Ils et elles les ont reliés à 331 places en crèche, sujet très émotionnel pour les genevois·es et donc un argument fortement axé sur la peur.

 

Ce sont d’ailleurs ces mêmes crèches que les partis de droite refusent de municipaliser et que les millions qu’ils font perdre à la collectivité par des diminutions de l’imposition pour les plus favorisé·es pourraient financer. Forts de leurs engagements, nous nous réjouissons de les voir proposer une pleine et entière attibution des recettes de la publicité pour créer des places en crèche suffisantes jusqu’à satisfaction de la population. Nous nous réjouissons aussi de les soutenir dans leur lutte annoncée contre les GAFAM et leurs publicités invasives.

 

Revue de presse

Libérons nos rues de la publicité!, Comité unitaire Genève Zéro Pub, Le Temps, 01.03.2023

Une consommation qui pose problème, Valentin Dujoux, Le Courrier, 01.03.2023

Face-à-Face – Pascal Holenweg (PS) et Jenoe Shulepov Bucher (PVL), La Tribune de Genève, 15.02.23

Libérons nos rues de la publicité commerciale, Moins! Journal romand d’écologie politique, janvier/février 2023

Un débat citoyen salutaire sur la publicité dans l’espace public, Le Courrier, 17.08.21.

Photos

Festival sur la publicité dans l'espace public - 26 novembre 2022

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